Présenté lors de la 23e édition du festival (5 – 13 juillet), ce programme spécial explore la diversité des points de vue afin d’offrir un voyage géographique et temporel dans un siècle de cinéma fantastique pour mieux appréhender l’évolution d’une thématique complexe et intersectionnelle. Décliné en une vingtaine de longs-métrages, le programme sera complété par une table ronde.
EAT THE RICH
Le NIFFF propose sa rétrospective EAT THE RICH, dédiée aux représentations des élites dans le cinéma de genre.
CONFERENCE THE RICH GAZE IN GENRE CINEMA
le 10.07, 13:30 – 14:30, PASSAGE 2
Modérée par la journaliste Judith Beauvallet, alias Demoiselles d’horreur, et avec la cher- cheuse Sophie Serrano notamment, cette table ronde complémentaire à la rétrospective examinera les métaphores dans le cinéma de genre comme reflet de la lutte des classes. Une discussion captivante sur l’évolution des messages politiques à l’écran.
INJUSTICES, PRIVILÈGES ET DÉCADENCE
« Quand le peuple n’aura plus rien à manger, il mangera le riche ». Attribuée à Jean-Jacques Rousseau, cette phrase, devenue au fil du temps le symbole du ressentiment des classes populaires envers les élites sociales, politiques et intellectuelles, est plus que jamais d’actualité et prend tout son sel dans le cadre du cinéma fantastique. En effet, dans un monde où tout et tous·tes sont perçu·es comme exploitables et où la répartition des ressources naturelles et économiques est de plus en plus inégale, le fossé grandissant entre les strates de la société n’a fait que renforcer l’envie de raconter ces déséquilibres et a donné naissance à des formes de narrations et d’esthétiques multiples.
En résonance avec SCREAM QUEER et FEMALE TROUBLE proposés lors des deux dernières éditions, la rétrospective EAT THE RICH met en lumière les oppressions systémiques et les injustices, et questionne leurs influences sociales et politiques, ainsi que les fantasmes qui y sont liés. En véritable miroir de leur époque, les films de genre font écho aux thématiques sociétales avec une grande liberté de ton, grâce à des représentations diverses, des plus littérales aux plus métaphoriques.
Ainsi, Luis Buñuel met à l’épreuve la bonne conduite de la bourgeoisie dans un huis clos fiévreux et questionne ce qu’il reste une fois le vernis social de cette dernière dissous (EL ÁNGEL EXTERMINADOR, 1962). Dans une forme plus pop mais à l’approche similaire, Brian Yuzna se délecte des turpitudes et des déviances cachées sous l’apparat d’une société états-unienne matérialiste et aisée (SOCIETY, 1989). Dans le film d’animation culte de Mamoru Oshii, GHOST IN THE SHELL (1995), le pouvoir est critiqué dans une dystopie mettant en scène un régime totalitaire où coexistent humains et cyborgs. Et quand les riches sont effectivement dévoré·es, ils et elles le sont par des zombies affamés (LAND OF THE DEAD, George A. Romero, 2005), métaphore des laissé·es pour compte de la société qui arpentent les rues désolées d’une Amérique du Nord au crépuscule de sa puissance. Dans SNOWPIERCER (Bong Joon-ho, 2013), la fulgurante ascension sociale du personnage principal est traduite visuellement par sa progression dans un train en perpétuel mouvement. Enfin, Jenna Cato Bass nous rappelle que l’intime est politique (GOOD MADAM, 2021) et que de l’exploitation domestique à l’exploitation ethnique, il n’y a qu’un pas.