Lors du 76e Festival de Cannes, la sélection officielle a su séduire la majorité des spectateur·rice·s, mais ce sont les programmes parallèles qui ont convaincus les amateur·rice·s de cinéma les plus avides. Entre films d’auteurs et drame japonais, voici le top 3 de clickcinema.
Cannes 2023 : Le Top 3 de Lliana Doudot
- Publié le 26. mai 2023
« Monster » de Hirokazu Kore-Eda – Compétition internationale
Rien ne peut préparer à la claque narrative qu’est « Monster ». Des heures après être sorti·e·s de la séance, on est encore parcouru·e·s de frissons en se remémorant ce film magnifique. Alors qu’une mère japonaise tente de comprendre ce qui arrive à son enfant devenu lunatique, un entrelacs de points de vue reprennent le fil des évènements selon différentes perspectives – effet que l’on connait bien chez le réalisateur nippon. Ce n’est qu’après avoir remonté plusieurs fois le temps que chaque pièce du puzzle nous est donnée. Si ce film a des allures de thriller, tant on retient son souffle au début, la seconde partie de l’histoire nous révèle si délicatement le cœur de la problématique qu’on en reste bouche-bée. Entre injustice, amitié et problématiques sociales, Kore-Eda nous montre que la vérité n’est jamais manichéenne : elle est bien plus complexe que les « gentils » d’un côté et les « méchants » de l’autre.
« Laissez-moi » de Maxime Rappaz – Sélection ACID
Le premier long-métrage du jeune réalisateur suisse Maxime Rappaz a de quoi séduire : Jeanne Balibar crève l’écran, avec son élégance naturelle, dans ce rôle multifacette. Entièrement tourné en Valais, ce film intimiste suit Claudine, une quinquagénaire qui balance avec équilibre ses devoirs et ses désirs. Une fois par semaine, elle monte dans un hôtel et s’adonne à des plaisirs éphémères avec l’un ou l’autre homme de passage, avant d’aller chercher son fils à sa leçon de piano hebdomadaire. Réglée comme du papier à musique, sa vie se passe entre les soins apportés à son grand enfant handicapé, son travail de couturière et ses parenthèses sensuelles. Lorsqu’un homme décide de rester pour elle, son quotidien est bouleversé. Rappaz a réussi ici à sortir avec finesse de l’éternelle représentation stéréotypée de la vierge versus la putain, dont la dichotomie dessert les figures féminines au cinéma depuis longtemps. A voir donc pour admirer un vrai portrait de femme complexe et touchant.
« Blackbird blackbird blackberry » d’Elene Naveriani – Quinzaine des Cinéastes
Ethéro tient le petit magasin alimentaire de son village en Géorgie, mais lorsqu’elle le peut, elle s’échappe pour aller cueillir des mûres près de la rivière. Alors qu’elle manque de mourir en glissant dans les eaux tumultueuses, la quinquagénaire décide d’insuffler un subtil changement dans sa vie : elle jette son dévolu sur un livreur, elle qui a toujours été seule et qui chérit son indépendance par-dessus tout. Pourtant, rien ne la fera abandonner sa résistance contre le modèle traditionnel que font peser sur elle les autres femmes du village. Elene Naveriani, sorti·e de la HEAD, nous offre donc une incursion en Géorgie, son pays d’origine, tout en gardant ses codes cinématographiques militants. Porté par Eka Chavleishvili, robuste et douce dans ce rôle puissant, ce joli film fait réfléchir sur les pressions sociétales, les choix auxquels sont résolues les femmes, et la décision de rester seules, si cela nous chante !