Pour sa première expérience au NIFFF, Djamila Zünd a trouvé le public très impliqué et une proximité exceptionnelle avec les réalisateurs. Elle se réjouit déjà de découvrir les pépites de la prochaine édition.
En attendant, voici son top 3 du Festival.
NIFFF 2024 : Top 3
- Publié le 14. juillet 2024
CUCKOO de Tilman Singer, THE PARAGON de Michael Duignan et LOS TONOS MAYORES de Ingrid Pokrope
Épreuve familiale sous haute tension au cœur des Alpes
CUCKOO, second long-métrage de Tilman Singer, plonge ses spectateurs dans un isolement oppressant au sein des Alpes bavaroises, créant une atmosphère de claustrophobie progressive tout au long du récit. Le film explore en toile de fond les complexités de la recomposition familiale à travers le regard de Gretchen (Hunter Schafer, connue pour son rôle dans la série Euphoria). Cette jeune fille, mise à l’écart par son nouveau noyau familial, voit sa relation avec son père (Márton Csóskas), sa belle-mère Beth (Jessica Henwick) et sa demi-sœur muette Alma (Mila Lieu) remise en question par des événements étranges qu’elle semble être la seule à remarquer.
La station alpine isolée, nouvelle résidence de la famille de Gretchen, évite le cliché du chalet de montagne et opte pour une esthétique stylisée, avec un mélange passionnant d’utilisation de smartphones et de boîtes à messages à cassettes, donnant à l’histoire une étrange intemporalité. Ce cadre justifie également la présence du père de Gretchen, architecte de profession, recruté par le propriétaire de la station, Herr König (Dan Stevens), pour effectuer des travaux de rénovation. Ce riche propriétaire excentrique, terrifiant et charmeur, à la limite du cliché de savant fou, reste obsédé par ses ambitions personnelles. Ses intentions pernicieuses à peine voilées font régner une délicieuse tension tout au long du film. Bien plus qu’un simple séjour à la montagne, cet environnement alpin se mue en un tourbillon d’horreur qui bouleverse et réinvente audacieusement les codes du genre. Ce thriller glaçant vous tiendra en haleine, les cris stridents de ses créatures résonnant encore longtemps après le générique de fin.
CUCKOO est résolument un film à suspense, captivant, mystérieux et terrifiant, qui offre une intense et troublante expérience cinématographique.
Une comédie paranormale
Michael Duignan réussit à créer une alchimie rare dans THE PARAGON, mêlant rire et émoi, grotesque et introspection. Le film s’impose comme une véritable master-class sur ce qu’il est possible de réaliser avec un budget limité et des acteurs convaincants. Bien que l’histoire aborde les thèmes de la vengeance et de la lutte contre un destin qui semble cruel et acharné, en suivant Dutch (Benedict Wall) dans une chasse aux fantômes pour une rédemption insaisissable, elle évolue vers une comédie attendrissante et touchante. Dutch, marqué par les épreuves de la vie, engage Lyra (Florence Noble), une experte en occultisme et en phénomènes paranormaux. Ce qui commence comme une sombre quête se transforme en une exploration du développement personnel pour le personnage principal. Celui-ci redécouvre une Nouvelle-Zélande sous-estimée et enchanteresse, où le paranormal côtoie des paysages immaculés, et se rend compte à titre personnel de l’impact considérable que l’on peut avoir sur les autres par de petites actions. THE PARAGON est un film fin et juste qui, bien qu’ambitieux, réussit à captiver sans décevoir.
Harmonies cachées
Dans LOS TONOS MAYORES, Ingrid Pokrope raconte l’histoire d’Ana (Sofía Clausen), une jeune fille de 14 ans qui vit à Buenos Aires avec son père. À la suite d’un accident, une plaque métallique est implantée dans son avant-bras, émettant des impulsions cryptiques qui, plus tard dans le récit, sont comprises comme étant du code morse. Curieuse de ces mystérieuses vibrations, Ana se lance dans une quête pour décoder le message qui lui serait adressé et le relie un peu par hasard aux paroles d’une chanson, ouvrant la voie à un récit plein de rebondissements que nous ne dévoilerons pas ici, pour laisser au spectateur le plaisir de découvrir l’histoire. Ce film argentino-espagnol explore les frontières de la suggestion mentale, où les limites entre la réalité et l’imagination deviennent floues. Convaincue de recevoir des signaux de l’au-delà, Ana se confronte à ses propres désirs et perceptions d’adolescente qui tente de donner un sens à sa vie à travers ces pulsations.
Ingrid Pokrope transforme habilement l’intrigue en une histoire prenante d’entrée dans l’âge mûr. Elle évite d’ailleurs les écueils de la fantaisie en intégrant les pulsations de la plaque d’Ana à son passé traumatique. Un film touchant et sensible à ne pas manquer.