Parmi les films visionnés par la rédaction de clickcinema voici leur Top 3, des films coup de cœur qui nous ont particulièrement enthousiasmés. Il est important de préciser «Vincent doit mourir» et «Mami Wata» faisaient aussi partie des films coups de cœur mais ont déjà fait l’objet de critiques détaillées (dans le dossier NIFFF 2023).
NIFFF 2023 | Top 3 de la Rédaction
- Publié le 12. juillet 2023
Samedi s'est achevée la 22ème édition du NIFFF qui a enchanté le public et la presse. Retour sur trois films coups de cœur !
Par Lliana Doudot et Abel Zuchuat
Acid (Just Philippot, France 2023)
Michal est allé trop loin dans sa lutte syndicale contre l’usine qui l’emploie. La violence de sa résistance l’a aliéné et Selma, sa fille de 16 ans, souffre de le voir trop peu. Un contexte global plus inquiétant encore s’immisce dans la narration d’“Acide” : le réchauffement climatique provoque des pluies qui brûlent tout ce qu’elles touchent. La menace, d’abord lointaine et entendue aux infos, se rapproche de plus en plus, jusqu’à ce que la panique s’empare d’Élise, la mère de Selma. Michal et Élise s’engagent alors dans une course contre la montre pour protéger leur fille. Mais dans une situation de fin du monde où la collaboration et l’entraide sont nécessaires, les pluies acides ne sont peut-être pas le danger principal dont devrait s’inquiéter la famille en crise… Entre réflexion sur la question écologique et portrait des tensions familiales de gens comme vous et nous, Just Philippot a su réaliser un film catastrophe haletant et ancré dans le réel. Le casting séduisant, avec Guillaume Canet et Laeticia Dosch, achève de créer une fresque réaliste des angoisses de notre époque.
Tiger Stripes (Amanda Nell Eu, Malaisie 2023)
De nos jours, certains sujets narratifs revêtent d’une importance capitale. Si dans ”Acide” Just Philippot fait de la science-fiction le miroir déformant d’une société écologiquement et socialement en perdition, dans ”Tiger Stripes”, Amanda Nell Eu conçoit le fantastique comme l’outil le plus directe et impressionnant pour matérialiser aux yeux du·de la spectateurice les violentes épreuves du corps féminin. Comment rendre compte en effet des douleurs physiques et psychologiques que subissent les femmes mensuellement, et de la confusion d’autant plus brutale que ces changements soudains provoquent chez les jeunes filles lors de leur puberté ? La solution retenue par Amanda Nell Eu est d’ancrer l’histoire de Zafan, malaisienne de 12 ans, dans le genre du body horror. La transformation naturelle de son corps est d’abord signifiée par une utilisation astucieuse d’un son strident et étouffant qui nous focalise sur les douleurs soudaines de la jeune fille. Mais cette façon, disons « réaliste », d’exposer le problème est vite transgressée par la réalisatrice au profit d’une métamorphose surnaturelle de Zafan. C’est littéralement tout son corps qui prend petit à petit les plis d’un monstre, d’un tigre dont elle, et bientôt ses camarades, doivent apprendre à dompter la violence. ”Tiger Stripes”, grand vainqueur du prix Narcisse H.R. Giger, est brillant non seulement pour la manière originale et très parlante avec laquelle il traite son sujet, mais également pour ses points de vue exclusivement centrés sur une jeunesse déboussolée et forte, comme laissée pour compte face aux croyances et aux certitudes des adultes.
Restore Point (Robert Hloz, République tchèque 2023)
Avant la projection de son film au cinéma Studio de Neuchâtel, le réalisateur Robert Hloz annonce la couleur : « Vous allez voir le premier film de science-fiction tchèque réalisé depuis 40 ans ». Si pour certain·e l’information ne casse pas trois pattes à un canard, elle démontre une fois de plus l’instinct affuté des programmateurices du NIFFF à dénicher chaque année des œuvres variées de grande qualité pour sa compétition internationale. Comment alors ne pas profiter de ce polar dystopique puissamment orchestré et au visuel très convaincant, surtout lorsque l’on sait qu’on ne le reverra probablement jamais dans une salle de cinéma ? Restore Point établit son intrigue au sein d’une société futuriste de 2038, alors qu’une technologie permet de ramener les morts à la vie à partir de points de restauration ; des sauvegardes qui ne doivent pas dépasser les 48h. Après l’assassinat d’un couple, dont seul l’homme a pu être restauré, l’inspectrice Trochinowska mène l’enquête, au détriment des marginaux technophobes, conformistes technophiles, mercenaires mystérieux ou bureaucrates corrompus. Déjà nommé le « ”Blade Runner” tchèque », ”Restore Point” ne tombe toutefois jamais dans la surabondance d’informations visuelles. Au contact de quelques dispositifs technologiques futuristes et à certains moments de magnifiques architectures brutalistes, le film propose un récit policier haletant prenant forme dans une froideur esthétique, un rythme lent et une atmosphère oppressante, non loin des ”Millénium” que proposaient tout à tour Niels Arden Oplev et Daniel Alfredson.